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Rituel du silence (Anne Brouan)

Brouan Anne

Rituel du silence

Tombeaux des oiseaux d'or. Diptyque. Poèmes d'Anne Brouan et gouaches de Evaristo.

EditeurLa rumeur libre

CollectionZωgraphia

Date de parution11/2011

ISBN/code barre978-2-35577-026-5

Format (mm)223 x 297

ReliureDos carré collé, cahiers cousus, couverture avec rabats

Nombre de pages144

Poids800 g

Illustration27 gouaches originales d'Evaristo (format original 50 x 60)

Ouvrage publié avec le concours de la Région Rhône-Alpes. Ouvrage inédit, fruit d'une collaboration entre le peintre Evaristo et Anne Brouan, contient 27 gouaches inédites.

Price £ 40.00
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Ouvrage publié avec le concours de la Région Rhône-Alpes. Ouvrage inédit, fruit d'une collaboration entre le peintre Evaristo et Anne Brouan, contient 27 gouaches inédites.

Anne Brouan. Le style arraché au néant. C’est à peine si la douleur l’ étonne. Dans son périple en-dessous du verbe, par une vitesse de songe et le jeu mêlé des ombres de la vie et de la mort, elle ressuscite le bien auquel on n’ose croire. Evaristo. Pas à pas et au-delà, larmier géant et éclairs de joie, il va dans le désert du dieu et des hommes et délivre la beauté close. Ils ont fait ce livre, rêveur, puissant, subtil, où ils vont ensemble, de la fleur rapide de l’ éther au choc puissant des racines. Puis quand la touche vénérable du temps est atteinte, l’ immortel envol bleui des ténèbres nous ramène vers la source. ( extrait de la préface de Patrick Laupin)

EVARISTO

LA DOULEUR D’ÊTRE DANS LA DOUCEUR D’APPARAÎTRE

Depuis les sources claires d’une humanité première nous parvient la voix d’Evaristo, venue de très loin, tantôt douce comme une pluie d’enfants, tantôt violente comme le cri des bêtes, les rafales du temps, la plainte des trépassés – derniers remords avant l’oubli. Car elle a traversé les champs désolés de l’exil, des nuits terrifiées de l’enfance aux lugubres visions de la guerre civile. Sa terre brûlante d’Espagne, qui nourrissait sa faim. Puis le feu des désastres. La solitude. La pauvreté. Et la fin de l’exode, la vie retrouvée dans la lumière rugueuse d’un monde sans artifices : l’amour des simples, le rude labeur des ouvriers aux silhouettes chantantes dans le petit matin ou penchées sur le soir qui descend, le peuple fraternel de Saint-Fons. Vallon Pont d’Arc : la terre natale ressurgie. Là peut enfin se pacifier le malheur, grâce à la compassion pour cette humanité blessée comme lui : « Dans ma petite voyance, je contemple avec mon cœur ce qu’ils me donnent à voir de moi-même et de tout autre et je le montre à travers l’émotion de mon amour. Si je provoque l’émotion de celui qui voit ma toile, c’est que c’est lui-même qu’il contemple alors. » Commence ici aussi l’amour de la poésie, sa grande amitié avec Roger Kowalski dont l’œuvre le fascine, car « en elle gronde une faim de pureté et d’élévation vers l’absolu. » Désormais, il cherchera souvent dans les livres les « trésors…qui l’ont aidé à réveiller du plus profond de (lui) des toiles insoupçonnables. »

Il y eut une période obstinément rouge, aux chasses magnifiques. Bêtes sauvages et créatures humaines dévorées par leur faim rapace de chair, de couleur, d’amour, d’espace, de vérité. Petites filles étranges aux regards prédateurs, aux bouches sans pardon devant la vie dévastée et meurtrie. Puis ce furent les paysages lunaires aux falaises hantées de spectres en dentelles de bronze, somnambules poèmes de pierre hallucinée. Et la terre solaire de l’Ardèche qui embrase de jaune pur, de vermillon et d’émeraude les toiles récentes où des anges de lumière passent en rêvant. Ils veillent désormais sur ce monde encore à naître, sur ces êtres blottis dans la chaleur d’une prière, le tremblement d’une étreinte. Mais à chaque époque, dans chaque tableau, qu’il soit féerique ou funèbre, c’est le même regard qui interroge l’abîme, dans sa muette inquisition comme dans la fureur d’une révolte contre tout ce qui exclut, renie, violente ou assassine.

La mort est effroyable, alors il faut la vaincre, nous dit Evaristo : ce que seul l’art peut accomplir « en en faisant quelque chose de très beau. ». Entre la beauté et la mort il y a comme un combat dans ses toiles, à même leur chair d’huile ou de gouache griffée de sang. Sans ce combat, il n’y a pas d’art. Car pour être affrontée, la mort doit être dévisagée. Derrière les moindres apparences de la vie, Evaristo tente de la démasquer et de la traquer, fustigeant toutes les vanités. Non pour la glorifier, mais pour lui arracher son masque et la terrasser. Il déchaîne alors les forces de la nuit : carnaval d’animaux tristes, défilé de monstres carnassiers, ronde de spectres affamés, Annonciations au lys vénéneux. La femme aux mains sereines, dans le crépuscule de sa vie, caresse déjà l’étoffe sombre de l’invisible ; la clarté d’une lune d’outre - monde resplendit dans la pureté de son regard fixé sur l’impensable blancheur. Superbe étole du silence froissée d’or et de pourpre que déroule la toile dans le jour défunt. Une mère contemple son enfant mort ; Christ inlassablement recrucifié. Des ombres violettes, un outremer impénétrable signent l’impossible envol des résurrections. Comme si la mort berçait notre humanité.

Fleurs sacrifiées, pour voiler ; étamine des cieux déserts. La dimension mystique, cette chose qui va plus loin que le symbole, où apparaît - elle dans la toile ? Dans la couleur, dans les traits, dans l’énigme des visages. Ces yeux d’ombre foudroyée de colère ou d’angoisse ne sont pas vides. Ils voient au-delà, ils rencontrent le secret d’une souffrance qui n’a pas d’explication dans notre monde. Et ce noir dans les orbites, c’est le signe de la profondeur de notre âme, énigme de la puissance qui nous lie dans l’amour comme dans la haine. Car il en va de l’invisible en peinture comme de l’indicible en poésie. Pour Evaristo, « un peintre est comme un poète. S’il n’est pas poète,  il ne peut pas montrer ce à quoi il se donne tout entier, dans la plus profonde pensée de son âme. » L’espérance en cet « autre chose » qui se dévoile ici-bas, sur la palette même du peintre, au cœur rouge et terrestre de son atelier, dans la tendresse d’une douce lumière de nacre, c’est l’espérance qui nous console dans l’espace abrité d’humain qu’est toute création. L’art nous console d’avoir vu jusque dans la douleur d’une émotion qui déborde la toile en couleurs broyées par la passion d’une urgente beauté, ce que nous ne pouvons pas voir et qui n’a ni mots ni visage pour caresser la douceur d’apparaître.

Ce que l’artiste ressent est comme une musique ; il n’a pas besoin de paroles ni d’explications : « La peinture et la musique sont comme deux sœurs. » Elles demandent de se sonder jusqu’à la mort dans une âme et dans un corps, jusqu’aux frontières de ce qui ne possède ni la trame d’un langage, ni la douceur d’un visage. Evaristo n’a cessé de peindre, infatigable, de l’aube claire au crépuscule vague, que pour aller au bout de ce chemin, au fond de cette nuit transfigurée où l’art et la vie ne font plus qu’un. À cet endroit à la fois lumineux et obscur de soi - même, qu’elle soit ébranlement violent d’exister ou suavité profuse des songes, Evaristo nous enseigne que « la vie consiste à être éprouvé. »

(postface d'Anne Brouan)

N.B. : les propos cités en italique sont d’Evaristo, extraits de documents du peintre ou d’entretiens particuliers avec Anne Brouan.

Press book

La violence apparaît dans un premier jour d'éternité

Roger Boulez

Lettre à l'auteur

(A propos de Rituel du silence)

Votre nouveau livre est une pure merveille…Les trois poètes placés en frontispice de vos textes peuvent être heureux de leur autre monde. J’aime infiniment la grandeur et la hauteur de votre écriture. Je n’y trouve plus les déchirements d’une douleur pas encore assimilée mais la violence s’est faite puissance et tout un univers apparaît dans un premier jour d’éternité.

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Evaristo a été, sans être perçu

Marius Alliod

Lettre à l'auteur du 23 février 2012

(A propos de Rituel du silence)

Chère Anne

J’ai voulu t’écrire très vite après ma première lecture de Rituel du silence, mais je me suis égaré en cherchant à catégoriser ta poésie… J’en ai conclu que si ma tentative ne marchait pas c’était dommage pour moi, mais ça ne l’était pas pour toi, car la poésie n’est pas destinée à la curiosité des linguistes….

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Douce sueur de la beauté

Bernard Noël

Lettre à l'auteur du 21 mars 2012

(A propos de Rituel du silence)

Merci, chère Anne Brouan, de ce poème

qui fait résonner l’espace que masquent les

images et les mots, non pour les dérober,

mais pour que nous fassions l’effort de

traverser...

)

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